• Le maraîchage, troisième mamelle sullyloise

     

     

     

    Le maraîchage, troisième mamelle sullyloise 

    La croix de Saint-Fiacre, patron des jardiniers 

     

     

     

     

    En ce week-end de comice, rendons un petit hommage aux maraîchers sullylois.

    Christian Cardoux, dans son excellent Sully-sur-Loire de la Révolution française à la Révolution industrielle (2003) déjà cité ici, nous en dit un peu plus sur la tradition maraîchère sullyloise (Chapitre VI : Le dix-neuvième siècle – suite et fin, Petite monographie de Sully à la fin du XIXe siècle, pages 75-76).

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    La culture maraîchère a probablement pris son essor dans les siècles passés, au moment où les Sullylois ont pu s’affranchir de la protection, mais aussi de la contrainte de son enceinte fortifiée. Le quartier du Pontereau, au sol alluvionnaire et fertile, enrichi encore par des apports réguliers de fumier et de terre de routes – ce seront les seuls engrais pendant longtemps – est particulièrement propice au jardinage, et les légumes de Sully sont toujours les meilleurs du monde […]. Des dynasties familiales de jardiniers se succèdent dans ce quartier d’une trentaine d’hectares, route de Coullons, route de Gien, route de Cerdon, rue de la Gare et rue de la Blanchisserie, arrosé en partie par le ru d’Oison. Le centre en est, très approximativement, la Croix Saint-Fiacre, au carrefour de la route de Bourges et de la rue des Épinettes, et qui a été restaurée en 1964. Citons, pour en garder la mémoire, et pour rendre hommage à leur apport au renom de Sully, quelques noms de la trentaine de familles dont les générations successives ont fait la renommée du maraîchage sullylois : les Montereau, Plancheron, Poulain, Avezard, Foquet, Giroux-Gautray, Chollet-Turpin, Génicot, Méthivier, Lestrat, Champion-Beaumane, Domain, Serre, Pouillot…, et j’en passe.

    Leur production est de deux sortes :

    -      Fruits, fleurs et légumes traditionnels : oignons, carottes, pommes de terre, choux-pommes, choux-fleurs, poireaux, épinards, haricots et salades diverses, proposés à la clientèle au marché de Sully le lundi**, un des plus importants de la région (il se tient sur les trottoirs de la Grande Rue avant d’être transféré sur les anciens fossés de la ville), et aussi sur les marchés de Gien, Nogent, Lorris, Souvigny, Cerdon, Argent, assez loin à la ronde donc, en ces temps où les transports se font en carriole attelée. 

    -      Les plants, surtout de betteraves fourragères, de choux-raves et de choux fourragers, destinés à être repiqués dans toutes les fermes des alentours. Les fermiers n’ont ni le temps ni l’art de produire ces plants de « légumes » comme ils disent, qui serviront de nourriture au bétail en hiver. Peut-être également le sol de leurs terres solognotes n’est pas particulièrement favorable au développement de semis qui réclament beaucoup de conditions favorables. Cette production se compte, au début du XXe siècle, en millions de pieds.

    Le jardinage est un travail pénible qui ne permet guère de faire fortune. Les jardins de 2 000/3 000 mètres carrés sont bêchés à la main et l’arrosage d’été, à partir de puits et de fontaines profondes, est également manuel.

    Le chemin de fer – encore – améliore la condition des maraîchers, en leur permettant d’envoyer leurs légumes aux halles de Paris, où ils sont appréciés, et de se spécialiser, particulièrement dans les salades. Ce trafic perdurera jusqu’à la deuxième guerre mondiale.

    Une innovation ajoutera un plus au début du siècle suivant à la notoriété du maraîchage sullylois : il s’agit de la culture du (ou de la) crosne (ou crosnes) qui apparaît vers 1905. Le crosnes – adoptons cette orthographe – est un rhizome importé du Japon en 1858 par un certain M. Pailleux qui en cultive dans son jardin, à Crosnes, en Seine-et-Oise, d’où son nom. Petit légume, au goût délicat, intermédiaire entre l’artichaut et le salsifis, il a cependant un défaut : sa culture, sa récolte, sa préparation exigent beaucoup de main-d’œuvre, ce qui le fera presque disparaître des marchés après la Libération. Il en a cependant encore été servi au banquet de la Saint-Hubert 1952.

    Si on ne faisait pas fortune dans le maraîchage, on s’entraidait. Un comité de maraîchers, fondé en 1780, s’était transformé en confrérie en 1830. Son principal rôle était de conduire les morts de la confrérie à leur dernière demeure et de fêter la Saint-Fiacre, le dimanche suivant le 30 août, avec messe, vêpres, procession derrière la bannière à la croix du saint patron, route de Cerdon et autour du quartier du Pontereau, le tout se terminant le soir par un banquet. Cependant les prières à Saint-Fiacre se révélèrent inefficaces lors de la sécheresse – centennale ? – de 1893, où l’on compta 73 jours sans pluie. Pour se venger, le bâtonnier de la confrérie ensevelit la statue du malheureux saint, dont il était dépositaire, dans un tonneau de cendre, ce qui fit grand scandale : la dite statue fut désormais conservée à l’église.

    Sympathique corporation, vivant un peu en vase clos, comme le faisaient les mariniers de Loire, elle a rétréci comme peau de chagrin : la confrérie a disparu en 1895. Il reste encore à ce jour quelques jardiniers qui, comme le faisaient leurs prédécesseurs, viennent offrir leurs produits le lundi matin et apporter une pointe de nostalgie et de tradition sur le marché de Sully-sur-Loire. 

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    ** Les jardiniers protestent régulièrement contre le choix du lundi comme jour de marché, qui les oblige à préparer leurs légumes le dimanche, quand tout le monde se repose.

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    [Mis en ligne le 29/07/2013]

     

    « C’est aussi l’été pour les étais (ou, la négligence finit toujours par se voir)Les tilleuls, le maire et le Zirtec »

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